Le préfet du Val-d’Oise a lancé ce mois-ci une opération de lutte contre l’insalubrité afin de lutter contre la prolifération des marchands de sommeil et la dégradation des copropriétés dans le département.

Grâce au nouveau dispositif, les poursuites judiciaires à l’encontre des marchands de sommeil seront accentuées. ©Préfet95

 

Ils ne pourront plus dormir sur leurs deux oreilles. Avec sa nouvelle stratégie de prévention, la préfecture du Val-d’Oise entend faire barrage aux marchands de sommeil qui achètent des logements puis les louent ou sous-louent à des dizaines d’individus au mépris d’infractions liées à la suroccupation, l’indignité, et l’insalubrité. Pour l’instant, l’opération, qui n’en est qu’à ses prémices, consiste à dresser des constats dans les différentes villes touchées du département afin de mieux cibler les zones concernées. En 2018, le Val-d’Oise comptait 3,6% de résidences principales privées potentiellement indignes, ce qui en faisait déjà le département de grande couronne le plus touché par le phénomène.

 

Sur le long terme, l’ambition est d’engager davantage de poursuites judiciaires à l’encontre des propriétaires peu scrupuleux : « Il faut rendre la vie impossible aux marchands de sommeil. Nous mobilisons les services communaux d’hygiène et de santé, l’agence régionale de la santé (ARS), ou même la caisse d’allocations familiales (CAF) pour construire une réponse efficace dans les prochaines semaines », développe Xavier Delarue, préfet délégué pour l’égalité des chances. 

 

Pour mener à bien l’opération, la préfecture s’appuie sur le portage foncier, dispositif qui permet aux communes de mettre en réserve des terrains auprès de bailleurs sociaux quand elles n’ont pas les moyens de les acheter. Des partenariats avec des filiales immobilières comme CDC Habitat ou Sequens ont été mis en place pour éviter les rachats par des propriétaires indélicats. 

 

Le dispositif de la préfecture se veut aussi dissuasif, en obligeant le bailleur à reloger les locataires à ses propres frais. Xavier Delarue estime que la démarche doit être pédagogique : « Ce n’est pas normal d’être locataire d’un bout de tapis à 110 ​ par mois au milieu d’une vingtaine d’individus. Les personnes locataires doivent prendre conscience qu’elles sont victimes ». 

A Sarcelles, près d’une centaine de marchands de sommeil

Patrick Haddad, maire (PS) de Sarcelles, connaît les conséquences de ces hébergements frauduleux. L’opération de la préfecture a démarré début mai par une visite dans sa commune, où les quartiers des Lauchères et des Flanades abritent plusieurs marchands de sommeil. Le 31 mars dernier, un incendie s’est déclaré dans la tour Languedoc, située dans le quartier des Flanades, en raison d’un ensemble de détritus laissés au cinquième étage. 32 blessés dont un grave ont été recensés à l’issue du sinistre. « Cet incendie montre que la présence de marchands de sommeil a des conséquences sur la façon d’habiter la ville, ils font fuir les propriétaires et les classes moyennes. Jusqu’ici, il y avait des signalements, mais très peu de poursuites, regrette-t-il.

 

Aujourd’hui, l’élu chiffre à une centaine, le nombre de marchands de sommeil présents à Sarcelles : « Ils sont un peu partout, y compris dans les logements sociaux, mais surtout dans les copropriétés. Il y a une dizaine de locataires par marchand, ça représente un millier de victimes », ajoute-t-il. 

 

Sa commune bénéficie depuis deux ans du permis de louer et de diviser, mis en place au sein de la communauté d’agglomération de Roissy Pays de France. Ces outils préventifs obligent le bailleur à demander une autorisation avant de louer ou diviser un logement dans une zone où l’habitat est dégradé. Par ailleurs, dès le 1er juillet, une opération de requalification des copropriétés dégradées (ORCOD-IN) sera signée. Elle permettra le redressement financier des copropriétés du grand ensemble à Sarcelles et de la résidence Mozart. Dix millions par an seront investis pour des travaux de rénovation, qui ne commenceront pas avant 2024 selon Patrick Haddad.