Condamnant cet ouvrage construit illégalement par un exploitant de Banthelu, quelque 300 personnes ont manifesté samedi dernier. Les contestataires veulent plus que sa remise en état comme déjà demandé par la préfecture et réclament l’ouverture d’une concertation entre les différents gestionnaires de l’eau pour empêcher son appauvrissement.

« On s’attendait à voir moins d’une centaine de personnes », partage Bernard Loup, président de l’association Val-d’Oise Environnement. Ce sont finalement près de 300 individus qui se sont déplacés jusqu’à Banthelu, ce samedi 28 janvier après-midi. La preuve, s’il en fallait une, que la population « est de plus en plus sensible aux procédés agricoles intensifs ». Riverains, associations, élus… Tous sont venus dénoncer la présence d’une méga bassine dans cette commune du Vexin, la seule d’Île-de-France.
 
Édifiée cet été « en toute discrétion », sans permis de construire, cette structure « est illégale dans la mesure où elle intervient dans une zone agricole protégée, qui n’est donc pas constructible », explique le militant écologiste. Un recours a d’ailleurs déjà été déposé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise par des habitants pour dénoncer cet ouvrage. La préfecture du Val-d’Oise a confirmé son irrégularité la semaine dernière et demande sa remise en état.
 

25 000 m3 de retenue d’eau

Victoire ? En partie, oui. « Je suis satisfait de cette décision mais ce n’est pas suffisant », soutient Aurélien Taché, député (NUPES) sur la dixième circonscription du Val-d’Oise. A ses yeux, le modèle d’une méga bassine n’est plus viable en pleine crise climatique, marquée par de nombreux épisodes de sécheresse. Celle de Banthelu, avec ses 25 000 m3 de retenue d’eau, « fait la taille d’au moins cinq piscines olympiques », regrette l’élu encarté depuis peu au parti Europe écologie les Verts. « Contrairement à ce que disent certains, ce n’est pas l’eau de pluie qui remplit les bassines », ajoute-t-il.
 

Construite illégalement, la méga bassine de Banthelu est la seule existante en Île-de-France.

Ces structures stockent de l’eau pompée ou forée dans les nappes phréatiques et servent à irriguer les surfaces agricoles. Une technique « dangereuse qui appauvrit les ressources en eau », juge Aurélien Taché. D’autant que dans un territoire comme le Val-d’Oise, où seules quelque « 3 % » des cultures sont bios selon le militant Bernard Loup, les sols sont abîmés par les intrants chimiques (énergie, engrais, matériel,…). Les exploitants se retrouvent ainsi à puiser de plus en plus profondément l’eau pour qu’elle soit de qualité – parfois jusqu’à 100 mètres.
 

« Les forages autorisés se multiplient »

« La méga bassine de Banthelu a au moins eu le mérite d’exposer la forêt de forages d’eau qui se cachent dans le Val-d’Oise et en Île-de-France », indique le président de l’association Val-d’Oise Environnement. Et au collectif « Demain le Vexin », qui lutte aussi contre le projet de méthaniseur au Perchay, de surenchérir : « Les forages autorisés ou en cours d’instruction se multiplient alors que la ressource en eau se fait rare. Le débit de l’Oise et des petites rivières du Val-d’Oise baisse, la recharge des nappes est déficitaire, le cumul des pluies pour 2022 est en baisse de 33 % ».
 

Les associations, ainsi que le député Aurélien Taché, demandent ainsi l’ouverture d’un espace de dialogue et de débat au sujet de la gestion de l’eau avec les acteurs concernés : agriculteurs, Etat, communautés de communes, syndicats,… Une façon d’empêcher « l’appropriation et la privatisation par des individus de ce bien commun qui est l’eau », martèle l’élu de gauche.