Depuis le mois de mai dernier, le collectif féministe sollicite les communes pour qu’elles diffusent leur campagne de sensibilisation contre le harcèlement des femmes. Dans le Val-d’Oise, les villes d’Argenteuil, de Sarcelles et de Montmagny en sont déjà les relais. L’initiative locale est en train de prendre une dimension nationale.

Exemple d’une initiative de la campagne adoptée par Montmagny sur ses réseaux sociaux

« C’est un symbole fort de la mairie de Montmagny », souffle Elvire Teno, adjointe du maire (DVD) Patrick Floquet. Depuis début octobre, la commune diffuse la campagne contre le harcèlement de rue pilotée par le collectif Héroïnes 95. Dernière ville en date du département à l’avoir mis en place, après Argenteuil et Sarcelles, Montmagny présente désormais sur son site et ses réseaux sociaux des informations et numéros utiles à contacter en cas d’atteinte aux femmes dans l’espace public. Pour Elvire Teno, c’est une « évidence d’en être le relais », appréciant « la démarche pédagogique » du collectif.
 
Composé d’une quarantaine de femmes originaires du Val-d’Oise, le groupe apolitique et féministe est né il y a près d’un an et demi. « Nous faisons de la sensibilisation contre les violences sexuelles, et luttons contre toutes les discriminations faites aux femmes », s’exprime-t-il. Les militantes font ainsi des collages sur les panneaux d’affichages, utilisent les réseaux sociaux en diffusant des informations pratiques et dirigent les victimes de violence sexuelle vers les autorités adéquates. C’est dans ce cadre-là que Héroïnes 95 reçoit « une vague hallucinante de témoignages de femmes victimes de harcèlement dans l’espace public » à la sortie du premier confinement. Une tendance confirmée par un sondage Ipsos qui montre qu’en 2020, 75 % des femmes interrogées évitaient certains lieux par sentiment d’insécurité, soit 10 points de plus que l’année précédente.
 


 

Les 184 communes val-d’oisienne contactées

Pour pallier la recrudescence de ce phénomène, le collectif a lancé, en mai dernier, « STOP Harcèlement de rue », une « campagne de sensibilisation massive pour informer la population et les victimes sur la nature des infractions, les conseils pour se défendre et les numéros utiles à contacter ». Une manière, aussi, d’informer le public du caractère délictueux du harcèlement qui consiste à « imposer à une personne des propos ou comportements à connotation sexuelle portant atteinte à sa dignité », selon le site du gouvernement. Pour ce faire, Héroïnes 95 entre en contact avec les municipalités, armé d’un formulaire de huit propositions « facilement réalisables et pas ou peu coûteuses » et dont elles peuvent s’emparer. D’un simple encart dans le journal municipal jusqu’à l’organisation d’événements citoyens, les villes ont le choix.

Un des visuels de campagne proposé par Héroïnes 95 que les villes peuvent afficher dans l’espace public.

 

Dans le Val-d’Oise, les 184 communes ont été contactées. La première à avoir répondu positivement est Argenteuil, en juin dernier, relayant la campagne sur son site internet et ses réseaux sociaux. Elle est suivie de près par Sarcelles qui a accepté de mettre en place toutes les initiatives. « Pour l’instant, nous collons des affiches sur différents sites de la ville avec les numéros d’urgence en cas de violence faite aux femmes », indique Isabelle Boursier, chargée de mission du droit des femmes. Par la suite, elle souhaite proposer au conseil municipal de faire « de vraies interventions sur le harcèlement de rue dans les maisons du quartier ». Avec Montmagny, ce sont donc trois communes qui portent aujourd’hui les couleurs de cette campagne dans le département. Eaubonne et Montmorency doivent bientôt leur emboîter le pas, révèle Eina, responsable de la communication du collectif.
 

« Il faut encourager ce genre d’initiative », Fiona Lazaar, députée du Val-d’Oise

Mais Héroïnes 95 ne s’arrête pas aux frontières du Val-d’Oise. Le collectif œuvre pour que « sa campagne devienne nationale ». Au total, « 900 villes ont reçu le formulaire », confirment-elles. Une nouvelle envergure rendue possible grâce à leur collaboration avec l’association Stop harcèlement de rue, ainsi qu’avec huit autres collectifs qui œuvrent à la diffusion de cette campagne dans leurs départements respectifs. Elle couvre désormais les territoires du Puy-de-Dôme, de la Moselle, de la Seine-Maritime, de la Marne, de l’Eure, des Hauts-de-Seine, de Maine-et-Loire et du Haut-Rhin.
 
Ce succès est arrivé aux oreilles de la députée du Val-d’Oise, Fiona Lazaar (LREM), qui suit Héroïnes 95 depuis ses débuts. « Elles défendent leur cause sans arrières pensées, applaudit l’élue. Ce sont des actrices de terrain et leur force est de travailler avec les tissus locaux des villes. Il faut encourager ce genre d’initiative ». C’est d’ailleurs pour cela qu’elle a décidé, en juillet dernier, d’accompagner le collectif aux portes du ministère chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes afin de parler de ce projet. Le collectif val-d’oisien a pu rencontrer Charlotte Groppo, conseillère en droits des femmes et Elisabeth Moreno, ministre de l’égalité, qui ont « très bien accueilli » la campagne. D’après la bénévole de Héroïnes 95, Eina, l’État « s’est engagé » à la présenter à toutes les communes du territoire.


Les huit initiatives proposées par Héroïnes 95 aux communes pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes :

  • Propositions zéro budget et réalisables en 24h :
    – Relayer sur les réseaux sociaux, à intervalles réguliers.
    – Diffuser des messages sur les panneaux d’affichage lumineux, à intervalle régulier
    – Mettre en ligne sur le site internet de la ville des informations de sensibilisation relatives à la loi et aux numéros d’urgence.
    – Publier dans le journal municipal un petit encart pour un rappel à la loi et les numéros d’urgence.
  • Propositions à budgéter :
    – Des affiches de sensibilisation à coller dans l’espace public.
    – Organisation d’événements citoyens.
    – Fournir aux bibliothèques, médiathèques ou MJC, une bibliographie d’ouvrages de sensibilisation, selon les tranches d’âge (enfants, adolescents et adultes).
    – Des pancartes « Espace sans harcèlement », à l’entrée des espaces publics (mairie, parc,…) pour interpeller les passants.