Alors que plusieurs scénarios sont sur la table pour l’avenir du Triangle de Gonesse, l’ancien ministre de la Transition écologique vient de signer une pétition s’opposant à toute construction. Un soutien majeur pour les militants qui viennent de déclarer cet espace agricole de « Zone à défendre » (ZAD).

Après avoir déjà qualifié le projet d’EuropaCity de « folie des grandeurs » au micro d’Europe 1 en juillet 2018, Nicolas Hulot réaffirme sa position contre tout projet de construction dans la zone dite du « Triangle de Gonesse », située entre les aéroports du Bourget et de Roissy. Le ministre de la Transition écologique a rejoint les quelque 9300 signataires d’une pétition lancée en janvier dernier. Sa signature s’ajoute à celles de plusieurs figures politiques telles que Clémentine Autain et François Ruffin, députés de La France Insoumise.

 

« Il s’agit d’une grande victoire pour nous », se félicite Bernard Loup, président du Collectif Pour le Triangle de Gonesse (CPTG) qui espère voir prochainement Nicolas Hulot visiter ce terrain comme l’avaient fait le député européen Yannick Jadot, Julien Bayou, le secrétaire national du parti Europe Écologie Les Verts, ou encore Éric Piolle, le maire EELV de Grenoble.

 

Cette zone agricole de 700 hectares devait initialement accueillir un gigantesque centre de commerces et de loisirs, EuropaCity et la gare de la Ligne 17 du Grand Paris Express, un réseau de lignes automatiques de 200 km qui doit permettre de faciliter les déplacements entre les banlieues. Il est également prévu un quartier d’affaires pour des PME, des sièges d’entreprises et des centres de Recherche et Développement sur plus d’un million de m2.

 

La gare de la ligne 17 au centre des hostilités

Lancé en 2007, EuropaCity a finalement été abandonné en 2019. Pour l’heure, trois scénarios sont sur la table à la suite d’un rapport rendu par l’urbaniste et haut-fonctionnaire Francis Rol-Tanguy à Matignon en juillet 2020. D’abord, le maintien d’une zone d’activité de 280 hectares avec en son centre la gare de la ligne 17. Une alternative à EuropaCity doit néanmoins être trouvée afin d’assurer la viabilité financière du projet. Le second scénario prévoit une zone d’activité réduite à 110 hectares autour de la gare, le reste conserverait une vocation agricole. Enfin, le dernier scénario projette le maintien des terres agricoles, et en conséquence l’abandon total du projet de la gare.

 

Opposant historique au projet EuropaCity, le CPTG a déjà obtenu une première victoire en empêchant la construction du complexe. Les opposants militent désormais pour l’annulation complète des travaux car ils entraîneraient l’urbanisation de la zone. Selon le CPTG, la construction de cette gare anéantirait tous les efforts effectués jusqu’à présent. « La Société du Grand Paris veut bétonner à tout prix en construisant une gare au milieu des champs sans le moindre projet utile justifiant l’artificialisation inutile de terres parmi les plus fertiles d’Europe », écrit le collectif dans un communiqué.

 

Le CPTG souhaite avant tout préserver les terres agricoles du secteur et y permettre la production d’une alimentation bio. « On mise sur l’avenir du bio avec ce projet, d’autant plus que le gouvernement espère avoir 50% de bio dans les cantines scolaires, déclare Bernard Loup. Or, on est loin du compte dans le Val-d’Oise et ce n’est pas en construisant une gare sur des terres agricoles qui pourraient servir cet objectif qu’on l’atteindra. »

 

De leur côté, la majorité des élus du Val-d’Oise, déjà révoltés par l’abandon d’EuropaCity, défendent l’utilité de cette gare qui serait pour eux la garantie de voir des projets sortir de terre sur cette zone. « C’est pour eux [les valdoisiens, ndlr]une perspective d’avenir et un accès amélioré à l’emploi et à la formation puisque la ligne 17 desservira d’importants pôles économiques. », affirme Pascal Doll, président de la communauté d’agglomération Roissy Paris, en évoquant également « la création d’une cité scolaire internationale ». Selon lui, la ligne 17 offrirait un gain de temps pour les habitants de Roissy Pays de France :  « Certains habitants de l’est du territoire de Roissy Pays de France, doivent repasser par Paris pour aller sur la plateforme aéroportuaire. C’est quand même un comble, s’emporte Pascal Doll. Bon nombre d’automobilistes pourront enfin utiliser les transports en commun pour aller travailler au lieu de prendre leur voiture. »

 

Le spectre d’un nouveau « Notre-Dame des Landes » ?

Déterminés à empêcher les travaux sur le Triangle de Gonesse, les militants ont investi le terrain le 7 février dernier et l’ont déclaré comme « Zone à Défendre ». Face à cette situation, les réactions des élus ne se sont pas fait attendre. Valérie Pécresse, présidente (Libres!) de la région Île-de-France, réclame « qu’on fasse respecter la loi, qu’on évacue cette ZAD et surtout qu’on fasse cette ligne 17, la seule ligne du Grand Paris Express du Val-d’Oise. ».

 

« On ne se laissera pas faire, on ne se laissera pas voler cette gare ! », martèle de son côté Pascal Doll, qui juge la pétition comme « contre-productive » et l’invasion du terrain comme « impensable ». Il rappelle également que le département agit en matière d’écologie et prévoit « la sanctuarisation de 16 000 hectares de terres agricoles pour les 30 ans à venir. »

 

Redoutant un scénario similaire à Notre-Dame des Landes, Marie-Christine Cavecchi, présidente (LR) du département du Val-d’Oise, demande quant à elle à l’État de « faire évacuer immédiatement ces terrains ». Cette dernière qualifie les militants de « délinquants » qui ont « une conception très limitée du débat démocratique et du respect de l’autorité dans notre pays ». « Le chantage et menaces explicites du représentant de ce collectif Bernard Loup sur l’Etat en rappelant les affrontements avec la police sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes est choquant et inacceptable », conclut-elle.