Le Conseil d’Etat a jugé recevables les recours déposés par des associations de défense de riverains et des communes de Gonesse et Saint-Prix. Ces dernières y voient une première victoire dans leur combat pour exiger que l’Etat applique une directive européenne, encadrant les nuisances sonores environnementales, notamment issues du trafic aérien.

Elles avaient décidé de frapper un grand coup en saisissant le Conseil d’Etat, en avril 2017, pour parvenir à ce que la France applique la directive européenne du 25 juin 2002 (Directive n° 2002/49/CE), relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement. « Le 23 décembre 2016, nous avions envoyé un courrier au Premier ministre, chargé d’appliquer cette directive. Le courrier resté sans réponse, nous avions décidé de saisir le Conseil d’Etat, la juridiction compétente », explique Françoise Brochot, présidente de l’Association de défense du Val-d’Oise contre les nuisances aériennes (Advocnar) [voir reportage du 26 avril 2017].

 

Moins d’un an plus tard, la haute juridiction administrative s’est prononcée en faveur des associations de défense de riverains et des communes de Gonesse et Saint-Prix, en jugeant recevables leurs recours. 17 autres villes ainsi qu’une autre association se sont associées à cette action collective. « C’est une première victoire et c’est en cela que nous sommes satisfaits », affirme Françoise Brochot.

 

 « On pourrait diminuer de moitié la population impactée », autour de Roissy, Françoise Brochot  (Advocnar)

La directive européenne impose notamment aux Etats membres d’établir une cartographie du bruit pour les grandes agglomérations et les grandes infrastructures de transports, notamment les aéroports. Pour les zones exposées à un bruit dépassant les valeurs limites, des plans de prévention du bruit dans l’environnement (PPBE) doivent être établis, dans lesquels sont identifiées des actions à mettre en place sur 5 ans, afin de réduire les nuisances sonores. Cette directive est applicable en France depuis juillet 2008. Or, le PPBE d’Orly (Essonne) n’a été approuvé qu’en 2013 et celui de Roissy Charles-de-Gaulle (CDG), fin 2016. Quant au PPBE du Bourget (Seine-Saint-Denis), il n’a en revanche pas encore été adopté.

 

Au-delà du retard accusé par la France, aux yeux des associations requérantes, les PPBE de Roissy Charles de Gaulles et d’Orly n’apportent pas les mesures de réduction des nuisances sonores imposées par la directive européenne. « Près de 247 000 personnes sont exposées à des nuisances sonores supérieures aux valeurs limites autour de la zone aéroportuaire de Roissy Charles-de-Gaulle. En appliquant correctement la directive, on pourrait diminuer de moitié, la population impactée », assure Françoise Brochot.

 

Une longue bataille judiciaire en perspective

Le Conseil d’Etat a décidé de renvoyer les actions des associations de défense de riverains et des communes dans trois tribunaux administratifs distincts, ceux dont dépendent les trois aéroports franciliens : Paris pour le PPBE du Bourget, Melun pour l’aéroport d’Orly et Amiens pour Roissy Charles-de-Gaulle. Une déception pour les associations. « Ce renvoi entraînera un allongement certain du délai de jugement et un risque de disparité des décisions », remarque avec regret les associations.

 

Un constat partagé par l’avocat de ces associations, Maître Louis Cofflard. Certes ce dernier voit cette décision comme « une bonne nouvelle » puisque le Conseil d’Etat « n’a pas donné raison au gouvernement », mais il regrette également que la haute juridiction administrative n’ait pas jugé l’intégralité de l’affaire. « Le Conseil d’Etat aurait pu juger tout de suite le contentieux au lieu de le renvoyer devant les tribunaux. Nous aurions eu alors une seule décision qui plus est définitive, sans appel possible. Le Conseil d’Etat n’a pas voulu le faire », déplore l’avocat.