Sous une forme chorale, les comédiens content la traversée du désert, les navigations de fortune, les feintes dans les aéroports, le commerce des faux-papiers… Comme un douloureux rappel de ces marges que l’on oublie dans le quotidien de nos vies, les 18 et 19 octobre au Théâtre des Arts.

81 av Victor Hugo©Willy Vainqueur_2 pour le site

Réunis en collectif, les « 80 d’Aubervilliers », immigrés sans-papiers venus principalement de Côte d’Ivoire, d’Afrique du Nord et du Bangladesh, ont réquisitionné, depuis août 2014, le 81 de l’avenue Victor Hugo à Aubervilliers, bâtiment désaffecté de Pôle Emploi. Au nom du collectif et sous la houlette d’Olivier Coulon-Jablonka, Barbara Métais-Chastanier et Camille Plagnet, huit hommes se sont portés volontaires et engagent leurs voix sur le plateau.

 

L’avenue Victor Hugo est une des plus chics et des plus prestigieuses avenues parisiennes. À Aubervilliers, l’avenue Victor Hugo abrite des entrepôts de commerce en gros, des boutiques d’import-export de textiles asiatiques, quelques magasins d’alimentation, un restaurant aveyronnais, un café-tabac-PMU et, sis au 81, face à un centre commercial chinois en construction, un ancien Pôle Emploi.

C’est ici que vivent, depuis août 2014, les 80 d’Aubervilliers, un collectif d’immigrés venus principalement de Côte d’Ivoire et du Bangladesh. Expulsés du passage de l’Avenir et de la rue du Colonel-Fabien ou chassés par l’incendie de la rue des Postes, se retrouvant donc sans-logis, les 80 d’Aubervilliers ont décidé, après 4 mois passés à la rue, de réquisitionner ce bâtiment en attendant de voir leur situation s’améliorer.

Sur scène, c’est l’histoire de huit d’entre eux qui se déploie, nous conduisant des faubourgs d’Abidjan, de Ouagadougou ou de Dhaka à ce présent de la lutte des sans-toits à Aubervilliers. Se dessinent ainsi des parcours d’exil et de migration qui s’étirent sur des continents et parfois des années.

« L’exil, c’est la nudité du droit », écrivait Victor Hugo il y a plus d’un siècle. « Les justiciers ont leurs lois » réplique Mamadou D., exilé ivoirien, en cette année 2014 qui a vu le nombre des migrants morts en mer Méditerranée augmenter de façon spectaculaire. La question de l’hospitalité commence avec ce droit qui excède la loi, tandis que sont mis en place en France et en Europe une série de législations et de dispositifs visant à contrôler et contenir l’afflux des migrants.

Quelle place accordons-nous à l’étranger ? À quelles conditions ? Et pour quelles conditions de vie et de travail ?

Invités à monter sur scène, ce sont ces questions qu’ils nous tendent en miroir. Chacun nous donnant à entendre et à voir un fragment de leur destin si singulier où la solidarité côtoie la violence, où la ruse répond à l’injustice, où une même nécessité de survivre fait face aux épreuves rencontrées.

 

Rencontre avec l’équipe artistique et Stefan Le Courant, docteur en ethnologie auteur de la thèse « Vivre sous la menace : ethnographie de la vie quotidienne des étrangers en situation irrégulière en France » : mardi 18 octobre – 20h45

Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris