Le député Arnaud Le Gall (Nupes) compile les nombreuses réclamations des usagers au sein d’une lettre qu’il compte envoyer à la présidente de la région, Valérie Pécresse. En rendant ce dossier « prioritaire », le parlementaire rejoint le combat mené depuis des années par les élus locaux qui dénoncent toutes les perturbations connues particulièrement au nord de la ligne.

« Le trafic est fortement perturbé sur toute la ligne en raison d’individus signalés sur les voies ». Cette annonce, Sophie la connaît bien. Depuis plus de trente ans, elle prend le RER D à partir de la gare de Louvres pour se rendre à son travail dans la capitale. Un trajet qui dure près d’1h20 aller-retour par jour, si tout se passe sans accroc. Malheureusement, Sophie en est loin aujourd’hui puisqu’il lui faut désormais « le double du temps pour faire ce voyage ». « Tous les jours, il y a un problème », déplore-t-elle.

 

« Quand il y a des perturbations, il n’est pas rare que le trafic soit complètement interrompu après Goussainville », déplore l’association SaDur

Suppressions de train, attente interminable ou encore déviations imprévues. Tous ces incidents s’amplifient particulièrement au nord de la ligne D, après l’arrêt de Goussainville. Au nord de cette commune, il n’y a qu’un train toutes les quinze minutes, contre un toutes les cinq minutes jusqu’à Villiers-le-Bel. « Dès qu’il y a une rame supprimée, il y a facilement un trou d’une trentaine de minutes pour ces usagers », avertit Jonathan Magano, président de l’association SaDur qui défend les intérêts des voyageurs du RER D.
 

« Le fait que je sois un député peut être un plus »

De plus, certains trains ont pour terminus Villiers-le-Bel ou Goussainville. Ce qui n’arrange parfois pas les choses. « Quand il y a des perturbations, il n’est pas rare que le trafic soit complètement interrompu après ces villes car il n’y a aucune structure de retournement [voie permettant de faire demi-tour, NDLR]entre Goussainville et Orry-la-Ville », ajoute le bénévole. Autrement dit, afin de fluidifier un trafic perturbé, les trains ne vont pas au-delà de Goussainville pour faire demi-tour plus facilement. Une injustice aux yeux de l’usagère Sophie qui n’est pas la seule à s’en plaindre.
 
« Le RER D est le sujet pour lequel je suis le plus saisi. Je reçois des mails tous les jours », révèle le député de la 9e circonscription du Val-d’Oise, Arnaud Le Gall (LFI). Il a rendu ces témoignages publics sur ses réseaux sociaux, parmi lesquels les individus se désolent « des trajets en Uber effectués à cause des suppressions de trains », « d’être restés coincés cinq heures dans le RER en pleine canicule » ou encore d’être devenu « phobique des transports ». L’élu de gauche dénonce aussi une discrimination à l’embauche et d’accès aux études dus aux nombreuses perturbations sur la ligne qui empêchent d’arriver en temps et en heure.
 
Arnaud Le Gall veut porter ce dossier « prioritaire » à la région Île-de-France, avec une lettre écrite à Valérie Pécresse qui réunirait toutes les plaintes reçues. « Le fait que je sois un député peut être un plus », considère-t-il, reconnaissant par ailleurs que d’autres avant lui ont déjà haussé le ton. « On lui a mis ce sujet dans les pattes », rigole Pierre Barros, maire (DVG) de Fosses. Depuis des années, lui et d’autres édiles de la circonscription alertent les pouvoirs publics. Sans succès.

À peine élu sur la 9e circonscription, le député Arnaud Le Gall reçoit des mails de plainte tous les jours.

 

L’association SaDur reste pessimiste

Arnaud Le Gall compte ainsi « s’inscrire dans la continuité de la lutte existante ». D’autant que la situation semble s’empirer. Selon Pierre Barros, une trentaine de trains ont été supprimés depuis la rentrée, à cause des travaux sur la ligne et du manque de chauffeurs. Or, de plus en plus de monde vit dans ces communes limitrophes au RER. Rien qu’à Louvres et Puiseux-en-France, un nouvel écoquartier a été livré, avec ses 3340 logements et ses 20 000 m² de zone commerciale. « La région et l’État sont partis prenantes de ces aménagements donc il faut que les transports en commun suivent », ajoute l’édile.
 
Ensemble, les élus veulent mener de nouvelles actions, comme par exemple « créer une pétition », indique Arnaud Le Gall. Si Sophie est ravie d’enfin trouver le soutien d’un parlementaire, le président de l’association SaDur, lui, est plus sur la réserve. « Le fait qu’un député mette en avant ce problème, c’est bien, mais on sait que ce ne sera pas suffisant. Sans volonté politique de la part de l’État, de la région et de la SNCF Réseau de régler les choses, ça ne va pas aller très loin », martèle Jonathan Magano, pessimiste.
 

Le projet Nexteo suspendu

À ses yeux, la meilleure solution serait d’augmenter la fréquence des trains, grâce au dédoublement des voies au niveau du tunnel ferroviaire entre la gare du Nord et Châtelet, empruntées par les lignes B et D. Mais, malgré les nombreuses études, ce projet est abandonné par la SNCF Réseau, « parce que ça coûte trop cher », soutient l’association SaDur.
 
Et Nexteo, soit l’une des seules alternatives proposées aujourd’hui, a lui aussi été « mis en pause » pour des raisons financières. D’abord destiné au RER E puis étendu aux lignes B et D, ce système aurait dû améliorer la cadence en automatisant la conduite des trains, leur espacement, leur consommation énergétique, l’information voyageur et les perturbations. « Cela aurait permis d’avoir des trains qui roulent plus rapproché avec une conduite uniformisée », regrette Jonathan Magano.
 

« Le temps ferroviaire est un temps long »

Dernière lueur d’espoir, la création d’une voie de retournement au niveau de la gare Survilliers-Fosses, utile en cas de problème pour créer une desserte après Goussainville. Notamment défendue par les élus locaux et le député Arnaud Le Gall, ce type de structure est discuté dans le cadre du schéma directeur du RER D, un document qui dessine les perspectives de la ligne pour les « quinze, vingt prochaines années », précise le SaDur. « Mais pour l’instant, ils en sont seulement au stade des prévisions pour pouvoir lancer des études afin de voir la faisabilité de ce projet », soupire Jonathan Magano, en concluant que « le temps ferroviaire est un temps long ».
 
Contactée, la SNCF Réseau n’a pas pu répondre dans les délais impartis. La question du RER D reste pour autant « un sujet pris très au sérieux mais qui demande une analyse poussée avec l’ensemble des parties prenantes et acteurs concernés (Transilien, IDFM, etc.) », soutient cette dernière.