La chambre régionale des comptes a étudié les finances du Val-d’Oise depuis 2015 et la mise en œuvre de ses compétences sociales comme l’insertion des bénéficiaires du RSA. Au travers cinq rapports, elle constate une amélioration de la situation financière mais pointe du doigt certains aspects de la politique sociale.

Les élus du conseil départemental, lors d’une séance plénière en février 2018.

« Une situation financière en amélioration constante depuis 2016 », voilà le tableau que dresse la CRC dans l’un de ses cinq rapports publiés de manière consécutive son rapport. L’un d’eux porte sur la gestion financière du conseil départemental du Val-d’Oise. Dans celui-ci, l’organisme se penche sur la période allant de 2015 à nos jours et constate que la situation financière « fortement dégradée » en 2015 avec plus d’1Md€ de dette s’est améliorée en revenant en 2018 à 929 M€.

 

Pour permettre cette amélioration, le département a engagé des économies sur ses dépenses d’aides sociales, en réalisant un « suivi plus rigoureux des allocataires du RSA, avec des ‘opérations perdus de vue’ et ‘radiés de Pôle Emploi’, la modération de la tarification acquittée aux établissements médico-sociaux et la diminution du placement en hôtel des mineurs non accompagnés […] au profit du placement en famille ou en établissement », constate la CRC.

 

À cela s’ajoutent un recul des dépenses de personnel en raison d’une « diminution des effectifs et de réorganisations », et une décision de « contenir les investissements aux projets les plus structurants ». Outre la baisse des dépenses, s’ajoutent une hausse des taux d’imposition en 2016 sur lesquels le département à la main (taxe sur le bâti foncier notamment).

 

Un autofinancement qui a doublé et une dette mieux maîtrisée

Cette politique menée par la majorité de droite et du centre, aux commandes depuis 2011, a « redonné [au département]des marges de manœuvre dès 2016 », selon la chambre régionale des comptes. L’institution a ainsi doublé sa capacité d’autofinancement (67 M€ en 2015 contre 150M€ en 2018) et ramené sa capacité de désendettement à 6 années contre 15 ans en 2015.

 

« Dans ce rapport, il y a des éléments qui concrétisent et marquent les efforts importants qui ont été réalisés par le département depuis 2011 », le tout « dans un contexte qui est reconnu comme particulièrement difficile et qui ne fait que s’aggraver encore aujourd’hui », estime Gérard Seimbille, vice-président (UVO) du conseil départemental délégué aux finances.

 

Si la CRC met en avant les mesures prises pour le redressement des finances, elle estime que des améliorations peuvent être faites en matière de contrôle du fonctionnement interne du département (achats publics et ressources humaines). Ainsi, elle estime inachevée la mise en place d’un « dispositif permanent et documenté visant à maîtriser le fonctionnement de la collectivité », et ce malgré la « recommandation de la chambre et les orientations décidées par la collectivité en 2014 ».

 

« Un certain nombre d’actions ont été engagées, il reste encore 2/3 éléments notamment sur la gestion du personnel » à mettre en place selon l’élu, qui ajoute prendre en compte ces « éléments qui sont minime », réagit Gérard Seimbille, vice-président aux finances.

 

Du côté de l’opposition socialiste aux manettes de 2008 à 2011, on fustige une politique dont le désendettement constituerait « l’alpha et l’oméga ». « Toutes les collectivités, même la région dirigée par Valérie Pécresse sont en alerte et disent qu’il faut à tout prix qu’on réaccélère sur le social et eux [la majorité]continuent et ne veulent pas passer la 2e », estime Nicolas Bougeard, conseiller départemental d’Argenteuil 3.

 

Un bilan « contrasté » sur l’insertion des bénéficiaires du RSA

Un autre rapport publié par la chambre porte sur la politique d’insertion des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) dont à la charge le département. La CRC estime que celle-ci est « globalement performante » et que certains de ses indicateurs sont meilleurs qu’au niveau national.
 
Dans le Val-d’Oise, la durée d’orientation est de 121 jours contre 152 jours ailleurs. Le taux de contractualisation (signature d’un contrat formalisant les mesures sur lesquelles s’engagent le département et le bénéficiaire) y est de 75%, moins que le seuil théorique de 100%, mais supérieur au taux moyen des autres départements (48%). Le nombre de personnes bénéficiant du dispositif depuis plus de 4 ans y est plus faible que la moyenne nationale (42% dans le Val-d’Oise, contre 50% à l’échelon national).

 

La chambre régionale des comptes pointe tout de même « quelques carences ». Celle-ci explique notamment que le « programme départemental d’insertion ne comporte aucun cadrage budgétaire ». Selon la CRC, le département a consacré en 2018 l’équivalent de 4,2% de l’enveloppe allouée aux allocations RSA en faveur d’actions d’insertion, soit 246€ par allocataire. Un chiffre inférieur à la moyenne nationale qui est de 7%. « Cette faiblesse comparative peut nuire à la prise en charge des besoins de l’ensemble des allocataires », selon la chambre.

 

Une analyse contestée par le département. « Il y a des dépenses d’insertion qui ne rentrent pas dans le dispositif d’insertion, par exemple pour les jeunes de moins de 25 ans qui sauf exception ne sont pas au RSA, mais ont une prime jeune », répond Philippe Métézeau (UVO), vice-président du conseil départemental délégué à l’action social. Ce dernier ajoute que les crédits destinés à la politique du programme départemental d’insertion ont récemment été augmentés de 19%.

 

Des carences pointées du côté de la Maison départementale de l’enfance

La chambre régionale des comptes s’est également penchée sur l’aide sociale à l’enfance (ASE). Celle-ci prend en charge les enfants ne pouvant être accueillis dans leurs familles, l’accueil des mineurs étrangers se retrouvant seuls sur le territoire français, et la gestion de la maison départementale de l’enfance (MDE) qui assure un accueil d’urgence des enfants et des jeunes en danger.

 

En matière d’aide sociale à l’enfance, la CRC estime que le département peut mieux faire sur le suivi des bénéficiaires. Si les évaluations des enfants ont pu se faire « généralement dans les délais réglementaires », celui-ci a pu atteindre 200 jours dans des « situations complexes et exceptionnelles ».

 

Concernant les mineurs isolés, la chambre qualifie leur mise à l’abri d’« effective ». Cependant, en se basant sur l’année 2018, elle a constaté que leur évaluation sociale n’a pas été « réalisée dans le délai de cinq jours prévu par la réglementation, mais dans un délai nettement plus long », à savoir 83 jours. Durant cette période, la mise à l’abri a majoritairement été assurée à l’hôtel, situation qui selon la CRC, peut ne pas « garantir le respect de l’ensemble des droits dévolus aux mineurs isolés ».

 

Côté majorité, on évoque une amélioration de la situation concernant les mineurs non accompagnés depuis 2018. « Quand la chambre a fait son rapport, l’évaluation était effectivement très longue, […] nous avons réinternalisé ce processus d’évaluation et grâce à cela, nous avons pu mettre en place des compétences accrues », expliquait Michèle Berthy vice-présidente (UVO) déléguée à l’enfance et la famille en séance plénière le 27 octobre dernier.

 

Visuel de la future maison départementale de l’enfance, prévue à Cergy en 2021.

Le dernier rapport, plus critique, concerne la maison départementale de l’enfance. La chambre y pointe une « carence de gouvernance » en raison d’une vacance prolongée du poste de directeur, de « sérieuses défaillances » dans la gestion des ressources humaines mais également d’une « absence de dialogue de gestion ». Dans sa réponse faite à la CRC, le département explique les « dysfonctionnements trouvent leur origine dans les stratégies adoptées depuis 2011 par les directeurs statutaires qui ont probablement trop pris en compte, dans leur action, le souhait de préserver l’autonomie de gestion » de la structure en raison de leur « statut particulier d’agent nommé par l’État ».

 

« Ce que nous dénonçons depuis des années, est maintenant certifié et écrit par la CRC », réagit à l’ensemble de rapports Nicolas Bougeard, conseiller départemental d’opposition. « On se fait taper dessus sur tous les composants qui font l’ADN d’un département, parce qu’il y a toujours la même ligne derrière, une gestion de bon père de famille alors que nous sommes dans une situation de crise grave, et cela depuis 2017 », estime l’élu.