«Laissez nous le dimanche, laissez nous notre liberté ! » Ils étaient une cinquantaine de salariés du magasin Alinéa, de la Patte d’Oie d’Herblay, à s’être donnés rendez-vous devant le tribunal de Pontoise vendredi. Le même matin, la CFTC assignait en justice quatre enseignes de la Patte d’Oie pour ouverture illégale le dimanche : Alinéa, Casa, Boulanger et Ikea.
Pendant plus de deux heures, les employés, dont une majorité d’étudiants, ont crié leur volonté de travailler le dimanche. Du jamais vu dans le département. Sur les banderoles, les messages étaient clairs : « Volontaires le dimanche », « Sauvons nos étudiants. » Mathieu, salarié chez Alinéa, nous explique leur mouvement : « Nous voulons tous continuer à travailler le dimanche. Il y a beaucoup d’étudiants ici, c’est le seul jour de la semaine où ils peuvent travailler pour payer leurs études. Mais il y a aussi des salariés à temps plein qui sont venus nous soutenir ».

« Nous sommes une grande famille »

Dans le tribunal, d’autres employés de l’enseigne d’ameublement, mais aussi de Boulanger, sont venus assister à l’audience : « Nous sommes une grande famille. Si le magasin ferme le dimanche nous allons perdre les étudiants et nous ne voulons pas ça. Nous sommes ici pour les soutenir, c’est du volontariat, nous ne sommes pas payés pour venir », précise Sandrine vendeuse chez Alinéa.
Dominique Mottais, directrice des ressources humaines de l’enseigne, explique que la fermeture le dimanche aurait des conséquences néfastes pour le magasin et ses salariés : « Nous faisons 26 % de notre chiffre d’affaire ce jour là. Si nous fermons, il y aura une soixantaine de licenciements, en grande partie des étudiants, mais aussi des salariés en CDI. » Il faut dire que sur les 154 employés, seulement cinq sont des CDD.

Pourquoi nous  et pas les autres ?

Du côté des avocats de la défense, l’argumentation est toujours la même. Pourquoi est ce que nous fermerions alors que les autres restent ouverts ? « Il y a cinquante enseignes à la Patte d’Oie d’Herblay qui ouvrent sans aucune dérogation », explique Maître Dueret-Proux. Même plaidoirie pour l’avocat du magasin Boulanger. Ce dernier, ainsi que son confrère de Casa, demandait le renvoi du jugement, étant donné qu’Ikea l’avait obtenu, pour que les quatre enseignes soient jugées en même temps.
Une demande qui faisait sortir de ses gonds l’avocat de la CFTC : « Après la contagion de demandes de dérogation à la préfecture, voilà celle de demandes de renvois. » Il faut dire que suite à la condamnation de Conforama, les autres enseignes ont commencé à s’inquiéter. « Il y a 129 enseignes dans le Val-d’Oise qui ouvrent le dimanche. Chacun des représentants dit qu’il fermera quand les autres fermeront. Si je dois accepter le renvoi du jugement à chaque fois pour juger toutes les entreprises en même temps, à ce moment là le procès aura lieu en 2009 ou 2010 ! », continuait l’avocat de la CFTC.

Renvoi le 6 avril

Le juge ne sera pas convaincu et décidera finalement le renvoi pour les quatre enseignes au 6 avril prochain. Une décision que craignait l’avocat de la CFTC : « Les magasins ont eu ce qu’ils voulaient, du temps. Cela va leur permettre d’attendre la décision du préfet quant à leur demande de dérogation sans avoir à fermer d’ici là. »

à l’inverse, la nouvelle va faire exulter les manifestants : « Nous sommes très contents », déclarait Mathieu qui partait aussitôt travailler. Dominique Mottais était tout aussi satisfaite de la décision du juge. « Cela va nous permettre de monter un dossier plus complet », indiquait-elle, remerciant les salariés de s’être déplacés de leur propre initiative : « C’est aussi grâce à vous. Votre mouvement a pesé dans la balance. » Elle en profitait également pour prendre rendez-vous avec un responsable de Boulanger afin de mettre leurs forces en commun pour lutter pour l’ouverture dominicale des magasins.

Thomas HOFFMANN
L’Echo Regional