C’est avec leur bébé âgé de maintenant 3 ans que la troupe est arrivée au festival. Une version théâtrale des chansons de l’auteur-compositrice-interprète: Anne Sylvestre. Sur scène: un guitariste, un mandoliste et surtout deux actrices parfaitement rodées, Katia Redier et Anne Veyry, pour une oeuvre contemporaine drôle et poétique. Nous avons suivi les deux derniers jours de la troupe argenteuillaise à Avignon. Entre espoir et coup de fatigue, bilan d’un mois en terre vauclusienne.


 Difficile de se faire remarquer parmi la foule des tracteurs. Ici c’est une concurence pure et parfaite qui fait rage, et la chasse aux spectateurs c’est la mission de Charlotte, la benjamine de la compagnie Baba Yaga. Rivalisant d’originatlité pour attirer le public, les troupes Off usent d’échasses ou encore d’une cariole au pianiste virtuose. "Il faut absolument venir tous les ans pour se montrer", lance Charlotte. "Pour une heure de tractage, c’est environ quatre spectateurs", estime t-elle et d’ajouter, "c’est le bouche à oreille qui fonctionne ici". Il faut dire qu’à Avignon, c’est le supermaché pour les programmateurs. Les compagnies de la France entière le savent. Cette année encore, elles sont venues plus nombreuses.

C’est l’heure de l’apéro, la troupe vient de quitter la salle du petit Louvre pour leur avant-dernière représentation. Sous le soleil d’Avignon le mistral tempère la chaleur en cette fin d’après midi, et  comme à leur habitude, en terrasse place Crillon, les huit accolites débriefent. "Ils étaient 11 dans la salle ce soir" lache grimaçant David Ruellan, comédien et metteur en scène . "Dur, dur" en cette dernière semaine, les festivaliers ont quelque peu déserté les lieux. "Au début ils s’arrachaient les tracts, ils venaient les chercher dans nos mains" explique un membre de la troupe. Il faut dire que lors des deux premières semaines, Nous Sommes de Celles affichait presque complet, remplissant à quelques sièges près, la petite salle de 80 places.

"On se fait même inviter chez les spectateurs"

Une affluence en berne, loin de démoraliser les Argenteuillais: "c’est le seul endroit où l’on peut rencontrer la France entière" explique David Ruellan, ajoutant "ici on a un vrai retour, plus qu’à Paris, on se fait même inviter chez les spectateurs". Mais en cette fin de festival c’est aussi la fatigue qui se fait sentir, et la question financière. Car 25 représentations à Avignon
"ça coute très  cher", une vitrine de près de 40 000€  financée à la débrouille, entre subventions publiques et coups de pouce privés. "Ca cimente la dynamique de création", constate Katia Redier, et d’affirmer: "c’est aussi ici qu’on apprend son métier".

Malgré une oeuvre de qualité et une bonne pub, les petits nouveaux d’Avignon n’ont pas décroché beaucoup de signatures des programmateurs. Une date seulement signée sur place par une programmatrice du Gard. Mais selon leur expérience de l’année passée "les achats se négocient après", entre septembre et décembre. Pour son deuxième festival, Baba Yaga ne repart pas complètement bredouille. Aujourd’hui leur rapport à Avignon a changé, et  la "peur de la grande foire" a disparu. La troupe projette même de jouer un nouveau spectacle pour 2011.