En 2015, Aymen, un jeune tunisien sans-papiers, participe au sauvetage de deux enfants pendant l’incendie d’un pavillon près de la gare de Fosses. Décoré par la mairie de la ville, il risque aujourd’hui de devoir quitter le territoire.

Alors que le « Spiderman » de Paris, Mamoudou Gassama, s’est vu naturalisé, Aymen, un jeune Tunisien de 25 ans pourrait, lui, se voir expulser, trois ans après avoir sauvé la vie de deux enfants en bas âge. Sans-papiers, le jeune homme n’a pas obtenu de titre de séjour et se voit aujourd’hui sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), prononcée par la préfecture du Val d’Oise, après que toute forme de régularisation lui ait été refusée.

 

(De gauche à droite) Aniss Latrouss, Johnny Barbosa et Aymen Latrous ont reçu en avril 2015 une médaille d'honneur de la ville de Fosses pour acte de bravoure des mains du maire Pierre Barros. (Crédit: mairie de Fosses)

(De gauche à droite) Aniss Latrouss, Johnny Barbosa et Aymen Latrous ont reçu en avril 2015 une médaille d’honneur de la ville de Fosses pour acte de bravoure des mains du maire Pierre Barros. (Crédit : mairie de Fosses)

« Il est venu nous voir à la mairie, il y a un peu plus d’un mois, on a essayé de le rassurer », confie Pierre Barros, maire de Fosses, apparenté PCF. « Cela fait 3 ans que la demande d’Aymen dure, c’est scandaleux ! C’est véritablement agaçant. Il faut revoir comment le système de naturalisation fonctionne, revoir les critères, revoir les quotas… Qu’ils le fassent pour Aymen, mais aussi pour les autres, parce que ce problème devient une généralité », continue le maire, visiblement indigné par le fait, qu’en dépit de son acte de bravoure et de sa décoration, Aymen n’a toujours pas accès à la naturalisation.

 

« Un acte exemplaire ! »

En avril 2015, Aymen et deux de ses amis sortent d’un restaurant, à proximité de la gare de Fosses. Sur le chemin, ils entendent des cris et voient de la fumée sortir d’un pavillon. Une femme, essayant d’éteindre le feu, informe les trois hommes que ses enfants sont encore à l’intérieur. Aymen et un de ses amis prennent les enfants de 19 mois et 4 ans en charge et les sortent du pavillon, avant de partir.

 

« On a voulu faire quelque chose, c’est un acte exemplaire ! », explique le maire de Fosses, qui a décoré les trois jeunes hommes juste après le sauvetage. « La situation d’Aymen était particulièrement compliquée, sans-papiers, sans travail concret, avec un numéro de téléphone qui change régulièrement… On a voulu l’aider à monter un dossier de demande de nationalisation, en appuyant cette demande par le fait qu’il ait déjà reçu la médaille de la ville de Fosses pour acte de bravoure », conclut-il.

 

Une histoire de médiatisation ?  

Mais alors comment un acte héroïque comme celui de Mamoudou Gassama peut valoir une naturalisation mais pas celui d’Aymen Latrous ? Pour Pierre Barros, tout est une question de médiatisation. « Ce qui a été fait pour Mamoudou Gassama, c’est formidable, mais ça ne suffit pas. Il y a une véritable incohérence ! Dans le cas d’Aymen, il n’y avait pas de caméras. On en a parlé mais sans en faire des caisses, car c’était aussi une volonté d’Aymen et rien n’a été fait, et ce, depuis 2015. Ce n’est pas normal que cela doive passer par les médias pour que des choses soient faites. C’est un combat permanent, deux poids, deux mesures, il ne devrait pas y avoir de concurrence entre les actes de bravoure », conclut le maire.

 

La préfecture du Val d’Oise a suspendu l’OQTF en attendant d’avoir de nouveaux éléments factuels pour confirmer l’acte de bravoure énoncé par la mairie de Fosses, suite à quoi une abrogation de l’obligation de quitter le territoire pourrait être prononcée.