Adopté en première lecture par l’Assemblée Nationale, mercredi 31 mai dernier, le projet de loi Alimentation et agriculture (EGAlim) ne comporte pas d’interdiction du glyphosate d’ici 2021. Les amendements concernant l’arrêt de l’utilisation de ce pesticide classé « cancérogène probable » selon l’OMS ont été rejetés deux jours plus tôt, dans un hémicycle déserté, notamment par l’ensemble des élus val d’oisiens.

Sept des dix députés du département ont voté, ce mercredi, en faveur du projet de loi alimentation et agriculture, issu des états généraux de l’alimentation, voulus par Emmanuel Macron en 2017. Ce texte est destiné à « assurer la souveraineté alimentaire de la France », « promouvoir des choix alimentaires favorables pour la santé et respectueux de l’environnement » et « réduire les inégalités d’accès à une alimentation de qualité et durable ». Il comporte notamment l’interdiction des promotions sur les produits phytosanitaires, le renforcement des sanctions en cas de maltraitance animale ou encore l’augmentation de la part du bio dans les cantines scolaires d’ici 2022… Mais pas l’interdiction du glyphosate, herbicide classé « cancérogène probable » par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), pourtant souhaitée par le Président de la République, Emmanuel Macron.

 

 

Évoquée par le Président lors des états généraux de l’alimentation en 2017, cette interdiction n’entrera pas dans la loi pour le moment. En cause : le rejet des amendements visant son interdiction d’ici trois ans lors de la séance qui a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi, où l’hémicycle était quasi-désert avec pas plus de 100 députés présents sur 577 et aucun élu val d’oisien.

 

Antoine Savignat, député LR de la 1ère circonscription du Val d’Oise

Le député, élu en février dernier était absent au moment où les amendements proposant l’interdiction du produit en 2021 étaient votés. « Nous souhaitions [les élus du groupe LR, ndlr]être là en masse pour ce sujet » mais « les amendements ont été abordés à une heure où ils n’auraient dû être abordés » explique le député. En cause,  un prolongement de séance souhaitée par le Président de l’Assemblée Nationale, François De Rugy (LREM) après une heure du matin.

 

Reconnaissant son classement cancerogène probable, l’élu de la 1ère circonscription avance qu’« il n’y a ce jour pas d’étude qui prouve la dangerosité du glyphosate ». Il estime par ailleurs que si interdiction du produit il doit y avoir cela doit être « une interdiction globale », c’est-à-dire, à l’échelle internationale. Car « si on interdit le glyphosate [en France, ndlr], on va faire baisser notre production ». Dans ce cas, nous serions « pénalisés vis-à-vis des productions étrangères qui en utilisent » et « risquons de tuer notre agriculture ».

 

Comme l’écrasante majorité des élus du groupe LR, Antoine Savignat, a fait le choix de s’abstenir sur le projet de loi. « C’est une abstention de vigilance. Ce texte ne règle pas grand-chose. Il ne se préoccupe pas des agriculteurs, rien n’est fait pour les protéger des quatre grandes centrales d’achat pour leurs garantir des prix corrects » explique-t-il.

 

Cécile Rilhac, députée LREM de la 3e circonscription du Val d’Oise

Signataire d’une tribune réclamant l’interdiction du glyphosate, la députée LREM, n’était pourtant pas présente dans l’hémicycle, lundi soir au moment de la présentation des amendements interdisant le produit, car « occupée sur un autre texte, celui sur l’apprentissage ». Elle se dit cependant « déçue que [l’interdiction, ndlr] ne soit pas inscrite dans la loi » et « attentive » à certains points dont la vidéosurveillance dans les abattoirs ou le glyphosate. Sur ce dernier, si les « amendements ne sont pas passés » c’est « pour permettre une transition avant d’éradiquer le glyphosate » car il faut « faire des lois pour qu’elles soient applicables ».

 

Un discours semblable à celui du porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. Celui-ci a déclaré, ce mardi matin sur Franceinfo, qu’« inscrire dans la loi les choses […] n’est pas la garantie que ça arrive »,  qu’il a été « inscrit beaucoup de choses dans la loi depuis 30 ans dans notre pays et ça s’est parfois pas passé » et, que « la contrainte et la sanction » ne sont pas « les seuls moyens de conduire des politiques publiques ».

 

Sans inscription dans la loi, la députée affirme avoir confiance dans la parole du gouvernement, « car il ne doit plus y avoir d’utilisation du glyphosate d’ici 3 ans ».

 

Fiona Lazaar, députée LREM de la 5e circonscription du Val d’Oise

Également absente lundi soir, la députée LREM de la circonscription d’Argenteuil et Bezons explique qu’« elle ne peut pas être partout » mais fait « confiance à ses collègues de la commission [des affaires économiques, ndlr] ». Elle affirme néanmoins qu’« il faut se passer du glyphosate d’ici 3 ans, comme le souhaite le Président ». La députée a en revanche voté pour le projet de loi « avec conviction, car il est issu d’une grande concertation ».

 

Zivka Park, députée LREM de la 9e circonscription du Val d’Oise

« Le glyphosate est un produit qu’il faut bannir » car « néfaste » explique la députée de la circonscription la plus à l’est du département. Pour autant, cette sortie doit être « progressive », car il n’y « a pas de solution alternative ». L’inscription dans la loi n’est pour elle pas nécessaire car elle a confiance dans l’« engagement du gouvernement ». Mais la députée se dit tout de même vigilante sur la question, et n’exclut pas de déposer un « projet de loi visant à interdire le glyphosate si les choses n’avancent pas », dans le cadre de la création d’un groupe de travail destiné à suivre la sortie du glyphosate. Une mesure évoquée par le délégué général En Marche!, Christophe Castaner, jeudi 31 mai sur RMC.

 

La députée a par ailleurs voté pour le projet de loi « car au-delà des controverses […] il y a des vraies avancées » notamment sur la « rémunération des agriculteurs », le « nutriscore » [système d’étiquetage nutritionnel facultatif, ndlr], ou la « séparation des activités de vente et de conseil » en matière de produits phytosanitaires.

 

Également contactés, les six autres députés du Val d’Oise n’ont, pour l’heure, pas fait suite à nos sollicitations. Le Président, Emmanuel Macron est quant à lui revenu sur l’interdiction du glyphosate, jeudi 31 mai en affirmant qu’il y aura « un point de rendez-vous » dans trois ans. Et d’ ajouter que « si les choses n’avancent pas […], on passera par la loi ».