En reprenant « Dans la solitude des champs de coton » de Bernard-Marie Koltès, Roland Auzet propose aux spectateurs une expérience à la fois immersive, intense et mystérieuse autour de la notion de désir. Entretien avec le metteur en scène.

Crédit : Christophe Raynaud de Lage

Crédit : Christophe Raynaud de Lage

Parlez-nous un peu de votre spectacle

Dans la solitude des champs de coton, c’est un deal entre deux personnes. On apprend petit à petit qu’il ne s’agit ni de drogue ni de sexe. Il est question de donner quelque chose que l’on n’a pas, à quelqu’un qui n’en veut pas, en essayant de le convaincre qu’il en a le désir. On s’aperçoit qu’il s’agit de prendre une forme d’ascendant sur la relation à l’autre par les mots. La mécanique de Koltès est imparable, car elle nous tient en haleine pendant une heure. Elle nous distille progressivement des éléments qui font que l’on comprend la nature du deal.

 

Vous avez décidé de mettre en scène deux femmes, pourquoi ?

À l’origine de ce texte, il y a Bernard-Marie Koltès, mais il y a surtout Patrice Chéreau, qui a mis en scène et même joué la pièce. Elle est très marquée années 80, avec toute la mythologie des hommes à cette époque-là. Pour convoquer à nouveau cette question du désir aujourd’hui, j’ai souhaité que deux femmes s’en emparent, sans changer le texte. Je voulais donner une sorte d’universalité aux mots et pouvoir réinterroger cette pièce avec un regard particulier. J’ai trouvé intéressant de solliciter deux femmes dans la narration d’un contenu qui originellement avait été écrit pour deux hommes.

 

Petite spécificité, les spectateurs sont équipés de casques audio…

Nous avons inventé un système audio où chaque visiteur a un casque personnel avec une petite boîte pour régler son volume. On entend les protagonistes comme au cinéma. En effet, sans tout vous dévoiler, la pièce se jouera dans plusieurs espaces, intérieurs et extérieurs. Nous basculons ce texte dans l’espace public, avec un cheminement à suivre tout au long de la représentation. Donc, il faut parfaitement comprendre les comédiennes. Il y a cette chose exceptionnelle d’avoir une personne à 20 ou 30 mètres qui nous tourne le dos, et de l’entendre comme si elle était au creux de notre oreille. Tout cela conduit à quelque chose de très intime, très sensuel, qui permet de parler de cette notion du désir.

 

Vous avez également décidé de vous appuyer sur la musique ?

La musique est jouée en parallèle de la représentation par un interprète. Les spectateurs entendent dans leur casque une partition composée de sons différents. Un peu comme au cinéma, elle permet de comprendre ou d’éclairer autrement un propos. Une situation peut s’arrêter, se prolonger ou changer brutalement de cap grâce à une articulation musicale. Il y une sorte de polyphonie globale d’éléments entre le texte, le jeu et l’audio.
Dans la solitude des champs de coton

 
Les vendredi 21 avril à 20h30 et samedi 22 avril à 20h30
L’Apostrophe – Théâtre des Louvrais
Place de la Paix / Pontoise
Tarifs : de 3 à 19 euros