De son Saint-Petersbourg natal, Olga Kisseleva  a été bercée par des images de la France de ses manuels scolaires. Une douce France avec ses monuments, son art de vivre…

D’où l’idée fixe d’aller à Paris. Elle y est arrivée non sans difficulté comme elle le raconte dans une vidéo que vous découvrirez à la fin de son exposition. " J’avais un ticket pour aller jusqu’en Allemagne. Ensuite j’ai fait de l’auto-stop.
Je me suis retrouvée non à Paris mais à Montélimard. Je me suis alors rappelé que j’avais été à un colloque sur les nouvelles technologies où il y avait un prof de Montélimard. Je ne sais pas pourquoi, mais j’avais gardé son numéro. Je ne connaissais pas, il est venu me chercher… C’est dans son atelier que j’ai découvert la vidéo ", raconte l’artiste.

Diplômée des Hautes Études en arts plastiques de Paris et de l’École des Beaux-Arts de Saint-Petersbourg, Olga Kisseleva a toujours été attirée par les nouvelles technologies. Elle est conseillère artistique auprès de Google et enseigne à la Sorbonne. Son travail est exposé dans trois galeries, Moscou, Marseille et New York.
Dans son exposition à l’abbaye de Maubuisson, l’artiste a voulu croiser deux monde. Ce site emblématique de La douce France avec les images de notre société de consommation. Autour de l’abbaye cistercienne, l’une des plus grandes zones PME d’Europe, les tours, de logements HLM… le décalage est saisissant.
Dans la grange, au dessus d’un labyrinthe dessiné au sol, Crossworlds, installation où des images comparables à celles des caméras de vidéo surveillance d’un centre commercial de la région, symbole de la société de consommation.

Les nouvelles technologies au service de l’art

Dans le parc avant d’arriver dans le cœur de l’exposition, des tags, sortes de codes barre, lisibles avec un téléphone portable, guident le visiteur.
Le parloir de l’abbaye s’est métamorphosé en Centre d’art fitness. Les appareils de musculation produisent des images de manifestations de masse (Ukraine, Gaza…). La façon artistique d’Olga Kisseleva de détourner la machine.
Dans la salle des religieuses, une carte de France, avec des  cubes que le visiteur peut déplacer à volonté, est composée de 100 logos des plus grandes entreprises françaises. Le monde serait-il contrôlé par les puissances économiques ? Ce Conquistadores est-il la nouvelle image de la France ?
Dans la même salle, des images vidéos sur le thème de Ma double vie. L’étudiant en Master d’Art et médias qui est obligé de travailler comme caissier pour payer ses études. Son seul échappatoire, récupérer les tickets laissés par les clients qu’il interprète en peinture. Quant à la jeune serveuse, étudiante en histoire de l’art, obligée de confectionner des sandwiches toute la journée,  elle s’évade en réalisant des natures mortes en apposant un regard critique sur le statut actuel des aliments, sacralisé autrefois par la peinture. Tout cela pour montrer le grand décalage entre leurs compétences et la place que leur accorde la société.
La douce France idéalisée par certaines images n’est plus ce qu’elle était. Par son décalage avec le site, l’exposition interpelle avec force le visiteur.

Eugénie DUPAQUIER
Echo Régional

Douce France
Vidéo – installation – sculpture
Jusqu’au 25 février 2008.
Ouvert tous les jours sauf le mardi de 13 à 18 heures, week-ends et jours fériés (sauf le 25 décembre et le 1er janvier) de 14 à 18 heures.
Abbaye de Maubuisson
Rue Richard de Tour à Saint-Ouen-l’Aumône.
Rens. : 01 34 64 36 10.